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 La Balance des Rêves

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Millain
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MessageSujet: La Balance des Rêves   La Balance des Rêves EmptyLun 20 Avr - 22:53

Un coup dans les côtes. La douleur remplace l’air dans mes poumons.
On me relève. On m’inspecte sous toutes les coutures : des griffures, oui. Mais pas de morsure. Je retombe lourdement.

Nouveau coup. Mieux qu’une lame dans la gorge.
Je roule sur le côté.

«Debout !»

Rêve-t-on quand on est mort ?

«Quoi ?»

Merde.
Je voudrais être mort, là tout de suite. Le ciel bas et blanc se reflète dans les flaques rouges, de telle sorte qu’on les croirait presque de pluie. Mon uniforme est imbibé.
La douleur irradie en lignes ardentes, comme une aura noire, des motifs croisés que les griffes ont laissées sur mon corps. Profondes, et sales. J’ai dû passer un bon bout de temps couché là car la fièvre a déjà commencé à faire son nid.

J’ai l’air d’un fou. Ils m’auraient bien volontiers laissé sombrer petit à petit dans ce caniveau, là, dans cette ruelle si sordide qu’elle n’en a pas de nom, si même les fous n’étaient pas réquisitionnés pour se battre contre l’invasion.
Et puis, on a tous l’air aussi hagards, aussi désemparés, aussi perdus. La fatigue d’une peur constante qui ne laisse plus place qu’à une profonde lassitude, qui vous vide la tête et vous anesthésie comme un mauvais chimiste.

Je ne dois pas donner l’impression d’avoir envie de bouger, car on me redresse brutalement. Le monde vacille et tangue autour de moi, emporté par le roulis. J’entends même, au loin, le grondement d’un effroyable tonnerre de poudre faire trembler les rues et vibrer les murs.

«Les canons des rebelles. On devrait pas rester là.»

Dès lors que je ferme les yeux je ne suis plus qu’une brindille que la mer retourne, et retourne, et retourne. On force entre mes doigts gourds la poignée d’une épée dont ils ne parviennent pas à retenir le poids.

«Abandonnez-le s’il peut pas marcher.»

Le choc de la chute se mue en bruit de fond, sourd, qui gagne en volume jusqu’à assourdir tous les autres sens. Pendant un instant, j’ai su que ce son allait me tuer. Jusqu’à ce que les rêves ne reviennent m’avaler comme un grand miroir.
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Millain
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MessageSujet: Re: La Balance des Rêves   La Balance des Rêves EmptyMer 22 Avr - 19:18

Une grande ombre était tombée, comme l’ombre soudaine d’un nuage de passage. Sur les toits des maisons, mélangée aux ombres des ruelles. Elle avait la forme d’une grande bête aux proportions indistinctes, aux longs membres crochus.

Je la regardais enjamber les bâtiments de foulées immenses. Elle est passée au-dessus de moi -brève éclipse- et tout était froid et immobile sous elle. Quand elle s’est éloignée, une nuit étrange était tombée. Elle était noire, d’un vrai noir d’encre, sans nuances, sans couleurs. Ni bleu, ni pourpre à l’horizon du couchant, ni écume violacée des mouvements stellaires. Pourtant, des étoiles la piquetaient, lointaines lumières sans halo, perdues dans cette nappe de naphte étale. Effrayante, silencieuse. Elle avait le goût de l’inexorable et du définitif, par un biais que je ne comprenais pas. Et, allongé dans la venelle, je ne pouvais que la contempler, languide d’une aube qui ne viendrait plus.
Pourtant des filaments d’or ont commencé à se dessiner. Difficile de savoir s’ils lévitaient sous mes yeux ou formaient les lignes d’élégantes constellations, tout là-haut. Ils ont formé des structures, un long triangle, puis…

Puis la nuit a passé quand une aveuglante lumière a frappé le ciel comme un gong.
Elle a tout effacé dans sa terrible brillance.
Elle avait cette indifférence des bons souverains à venir à mon aide, toujours, alors que je ne cherchais qu’à la fuir, toujours plus loin. Exaspérante de compassion, de pitié, de la volonté de tout donner à qui ne voulait rien. Je n’avais que faire de la pitié, de Sa pitié.
J’avais choisi la voie du sang, que devais-je faire d’autre ?
La tendre pénombre de mon cauchemar m’est arrachée. La lente glissade vers la fin, le long silence, la disparition de tout sentiment, de toute émotion. Tout me frappe à nouveau.


Tout me frappe. La lumière d’un jour morne tape contre mes paupières pourtant closes. L’odeur du sang, âcre et intense d’avoir mariné des heures durant, me ferait tourner la tête si elle n’était pas déjà en train de valser librement, comme si la dureté du sol sous elle ne l’arrêtait plus. Le goût lui aussi m’embrume, et carillonne à mes oreilles une voix désagréable, qui souffle des prières, qui murmure des psaumes.

Faites silence. Je ne m’entends plus mourir.

Il y a une interruption. Ma tête roule, mais cette fois, les pavés sont là pour l’empêcher de tournoyer démentiellement. Je le vois, même, avec son visage rougeaud, réjoui de me voir reprendre connaissance. Il croise mon regard, l’espace d’une seconde, et tout son corps est pris d’un mouvement de recul.

Trop. La peur, le malaise, la joie passagère qu’il ne contient pas d’avoir soigné les blessures et chassé la fièvre, c’est trop. Tout roule et tourbillonne de lui comme une chaleur trop intense, une autre sorte de fièvre qui court de l’extérieur pour se nicher entre mes côtes.

A tâtons, je retrouve l’épée qu’on avait voulu me forcer à prendre. L’autre a un mouvement plus marqué, la surprise et l’effroi le teintent d’un gris presque blanc. C’est du rouge que je veux voir. J’ai à peine besoin de me relever. Un revers de la lame, et la pointe tranche dans la chair de la gorge. L’horreur, noire, éclate de ses yeux. Il essaye d’appeler la Lumière d’un souffle que le sang lui vole. Ca suffit ! Ca suffit ! Puisque je dois vivre, puisque la Lumière m’arrache à ma calme chute, à mon doux oubli, c’est elle qui devra en payer le prix. Une âme, pour une âme.

Il est à terre. Ses yeux me regardent encore. Vides, désormais, donc supportables.
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MessageSujet: Re: La Balance des Rêves   La Balance des Rêves EmptyDim 10 Mai - 20:51

La Balance des Rêves Bleu1010
L'Appel du Noir



Dormir, c’était tout comme mourir. Sauf que l’on pouvait changer d’avis.

Le temps était d’un bleu presque gris, du couchant dépassé et de la nuit à peine tombée, pas encore pleine de son noir taiseux de toute lumière. Ou de ces heures décolorées d’avant l’aube, que le soleil absorbe pour rayonner d’un éclat plus glorieux encore, par contraste.
C’était ces heures que je préférais. Quand tout était terne, atténué, privé de résonance. D’une sérénité de vide, de sommeil, d’oubli. Quand tombait la nuit, ou se levait le jour, que l’on rentrait ou que l’on n’était pas encore dehors, une poignée de minutes en suspens, comme des grains de poussière piégés d’un éphémère moment.

La brise y frissonnait d’une fraîcheur neuve, propre, qui n’était ni brassée de foule, ni traversée de murmures, de passages furtifs de marauds en expéditions nocturnes. Elle invitait à la réflexion, à l’introspection par sa claire netteté, donnait l’espace d’y déployer ses idées, le silence de les entendre, la maigre clarté qui leur donnait relief.
Pour moi, c’était le poids sur mon sternum qui se levait, temporairement dissous dans la grisaille de l’absence des ressentis, des émotions bafouillées, échangées à grands cris ou soufflées à chuchotis, quand il n’y avait rien d’autre à percevoir que mes propres troubles, mes propres couleurs.
Et de mes bras levés pesaient mes os, le poids de mon squelette en moi qui m’alourdissait comme une ancre, comme si ma chair ne pouvait bloquer l’attraction du sol, n’était qu’une masse malléable qui menaçait de lui faire passage - un ensemble sans queue ni tête, désorganisé, désarticulé, qui ne semblait plus tenir que d’un fil.

C’était la vision de ces chiens noirs, de ce noir sans reflet ni ombre de n’être pas réel, qui irradiait et coulait dans l’air comme peinture dans l’eau; ces sombres dogues du Vide, chiens de l’enfer, molosses de l’au-delà aux yeux trop pâles et aux crocs trop rouges. Ils dévoraient sans bruit aucun, et même les os, brisés dans leurs mâchoires, semblaient éteints de tout son. Et le rouge coulaient sur leurs gueules, leurs poitrails, comme trop épais pour se mélanger à leur noirceur, ou elle trop entière, trop mate, il jaillissait et éclaboussait de leur morbide festin sans qu’ils ne se soucient de le laper.


*


Et voilà qu’ils redressent la tête, comme un seul homme -un seul chien- et leurs regards d’une étrange pâleur, inhumaine, sans iris ni pupilles, m’atteignent et me harponnent.

Il y a des monstres dans l’Ombre, des créatures dans le noir, que leur traque infinie guide en dehors des royaumes du Vide, et je les sais me guettant, moi l’étranger, au moindre faux pas, la moindre chute - jusqu’à ce que la première lueur du jour perce et transgresse d’or le bleu, et ne nous disperse, tous, de nouveau.


Dernière édition par Caleb Warvold le Sam 23 Mai - 1:12, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La Balance des Rêves   La Balance des Rêves EmptyVen 22 Mai - 22:15

La Balance des Rêves Bleu1011
Un passage



Dans mes rêves, je ne crains pas de tomber. Puisque, si longue soit la chute, je ne fais qu’atterrir dans mes propres mains.

Le jour m’angoisse et m’assomme. De longs rais d’or percent les nuages habituellement épais ce matin-là comme des lances à l’estoc parfait. J’ai beau fermer les yeux, leur éclat est difficilement soutenable.
Le temps passe long, et lent. L’ombre de l’arche ne sera pas sur moi avant plusieurs heures.

Le babillage expansif de mon collègue est tout aussi assommant. Il ne semble pas avoir remarqué que je n’y prête aucune attention et les bruits incompréhensibles que sont devenues ses histoires se mêlent au brouhaha ambiant de la foule passante.
Je déteste faire le planton.

L’uniforme me serre le cou. «On ne fait pas pour les enfants» ont-ils dit. J’ai mis un temps à réaliser qu’ils se moquaient de ma taille.

La pierre appelle mon dos. Dormir, j’aurais tant voulu dormir, et retrouver le noir de la non-conscience. Affronter le vide des créatures de mes cauchemars, le silence et l’inexpressivité; tout ce qui m’atteignait moins que le flux constant d’émotions mêlées comme un écheveau chaotique, tout autour de moi, contre lequel je devais lutter activement pour qu’il ne m’envahisse pas. Les pleurs des mendiants, ici, la harangue agressive orangée de marchands qui cherchaient à se surpasser les uns les autres là, l’empressement incertain de familles, le dédain latent, pourpre, d’une paire de nobles.
Comme une rivière de couleurs refluant autour de la nappe bleue et immobile que je formais, appuyé contre le mur.

La grisaille finit enfin par reprendre ses droits et étouffer la lumière matinale. Pourtant, une lame d’un jaune vicieux découpe encore le jour terni.
La flèche de la cathédrale. La Lumière, le coeur même de la capitale, bâtie au centre de la ville. Une symétrie à vous en donner la migraine.

Je ferme les yeux. Je m’abandonne au balancier de la mémoire.

Si les manoirs et les tours sont sa voix portée, les catacombes et les caveaux sont les murmures de la terre.
Il y a là en-bas une cage qui m’attend dans un souterrain à l’abandon; il est à demi écroulé, inondé, et le jour y filtre. J’y erre en compagnie de la foule de spectres, anonyme dans la masse, invisible, sans visage peut-être. Pour eux, je n’existe même pas. Pourtant les piles d’ossements sont dérangés et je suis le seul visiteur; lorsque les regards sans yeux se tournent vers moi, je trouve refuge dans une ombre.
Il est facile de s’en approcher, de se mêler à elle comme une encre à l’eau, là en-dessous. Elles foisonnent, s’accumulent, se télescopent.
Deviennent plus noires et plus profondes, lorsqu’elles s’agglomèrent en quantité dans la poussière d’un recoin.
Lorsque je me plonge dans celles-là comme dans l’eau d’un bassin, je sais ce qui m’attends dans les profondeurs.
Le regard pâle des molosses à mes trousses.
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