Rumeurs de la compagnie

Salvador récupérait. Ses tremblements n'étaient presque plus que de l'histoire ancienne, de même pour le reste de ses maux. Et il ne manquait pas de mettre à profit ce regain de force : Aussitôt aura-t-il entrepris de réaliser le projet sur lequel il était penché.

Son armure étalée en travers de la table de la tour, des bourses de poussières étincelantes dispersées aux quatre coins, un bâtonnet en vrai-argent en main, il aura pris soin de décortiquer les enchantements parcourant déjà les plaques de son équipement, afin d'y imbriquer de nouvelles formules enchanteresses bien plus complexes.

Il aura par ailleurs demandé pour toute la durée de la manœuvre de ne pas le déranger. Laissant cependant les patrouilleurs et guetteurs aller et venir dans la tour au gré de leurs besoins, mais il exigeait que nul n'approche de sa zone de travail ou de ses composants.

Ce n'est que des heures plus tard qu'il ressortira de la tour pour gagner le terrain d'entrainement. Son armure portait désormais des traces bien plus parlantes de ses modifications : De nombreuses runes étaient gravées sur chacune de ses pièces, qui luisaient d'un doux scintillement azuré. De même, les reflets sur le métal étaient sensiblement plus vifs, et plus réactifs aux perturbations.

Il fit également signe au premier mercenaire venu, afin de procéder à quelques essais. Des manœuvres bien simples, le mercenaire désigné n'ayant comme mission que de frapper le mage, une rare occasion de pouvoir se défouler sur un allié. Un entrainement qui aura mis en lumière tout le potentiel de l'enchantement : Les coups étaient grandement amortis avant même d'atteindre l'armure, et les gantelets prolongés par les protèges-bras étaient désormais capables d'invoquer des écrans protecteurs prenant la forme vague d'une carapace de tortue, une sorte de mur constitué d'une myriade d'hexagone éthéré.

L'entrainement ou plutôt ces tests se montreront plutôt concluants, les protections tenant sans mal face aux assauts habituels. Et ce bouclier éthéré ne cèdera au final que face aux chocs les plus violents.

Quoiqu'il en soit, cette animation aura eu le mérite d'occuper les quelques mercenaires oisifs et les plus curieux. Qui sait jusqu'où le sorcier d'Alterac pourra pousser les limites de ses enchantements.

Dans la soirée la dernière mage ayant rejoins la compagnie se sera glissée dans l'infirmerie à deux reprises. Une première fois aux côtés de la médecin-cheffe et la moniale kaldorei au chevet d'un patient et un peu plus tard, armée cette fois d'un bâtonnet en vrai-argent et d'une note.

La note aura d'abord été remise à Alieg avant que Rebecca ne se mette au travail. Ainsi donc, quelques runes - de protections pour les connaisseurs - auront été tracées par l'enchanteresse. Rien de très recherché ou complexe cela dit, elles finiront d'ailleurs par s'estomper d'elles-mêmes au bout de quelques jours.

Ceci fait, la recrue sera venue rendre compte à la sorcière des moissons une dernière fois avant de regagner les créneaux du rempart nord pour méditer et observer l'horizon.

Citation :

La tempête de neige a cessée depuis déjà une bonne journée. Il fait toujours très froid sur l'île de la Renaissance et l'épaisse couche blanche semble partie pour durer un temps.

Il y avait juste en face d’elle son bel Apollon ; le dos droit, le menton haut, et la mèche rousse en désordre. Il avait fière allure dans son uniforme d’officier de l’Alliance, tout de bleu et d’or. Ces couleurs-là lui allaient bien au teint.
Jeune, séduisant, son esprit était l’un des plus vifs qu’elle ait jamais connu ; plein d’empathie pour son prochain, il n’omettait pourtant pas de considérer tous les choix avant de s’engager corps et âme dans une voie.
Mesuré et maître de ses émotions, rarement laissait-il entrevoir ses véritables sentiments. Les confidences se faisaient sur l’oreiller, ou à défaut à l’écart des autres. Ce n’était qu’ensemble, tous les deux seulement, qu’ils se livraient entièrement. Un regard leur suffisait parfois pour se comprendre.
Pourtant… ce soir, cela était différent. La contrariété se lisait sur les traits du jeune homme ; il articulait des paroles que ne saisissait pas une Colin désemparée.
Alors il lui parlait de plus en plus fort, la bouche ouverte comme un énorme gouffre noir dont n’en sortaient que des cris suraigus.
Aucune supplique ne vint à bout de son désespoir, et aucun répit ne fut accorder à la prêtresse, des rigoles de sang s’écoulant de ses oreilles et de son nez.
Et pourtant la chose continuait de rugir, la retenait tout contre elle en étreignant ses poignets de doigts crochus.
Il fallait que cela cesse…  
Qu’elle extermine cette créature.
Il ne s’agissait pas de son Apollon. Elle en était sûre, désormais. Il n’était pas même ici, à ses côtés, mais à des kilomètres.
Alors, à son tour, elle hurla. Elle hurla de toutes ses forces un mot de pouvoir pour repousser le Mal, elle hurla de toutes ses forces pour couvrir de sa voix les cris inhumains du monstre.
Et enfin elle hurla : « ASSEZ ! ».


Le silence.


Juste le silence.


Et le soulagement avec lui.


Enfin.
Enfin ces cris prenaient fin.


…


Mais ce fut un soulagement de courte durée, car il s’éternisa étrangement ; les battements de son cœur résonnaient trop fort dans sa tête, et le bruit de sa respiration lui faisait tout drôle.

Elle avait réclamé le silence et l’avait obtenu ; enfermée dans son esprit, il n’y avait que Sa voix pour la guider à travers cette épreuve.

Il sursauta au bruit d'une brindille brisée sous un pas, le faisant faire brusquement volte-face. Le claquement de la corde, le carreau qui file... Puis l'impact sourd du métal se plantant dans quelque chose... de dur ? ... Du bois, d'après son expérience. Sa cible, bien plus petite que ce qu'il imaginait un instant plus tôt, bondit dans les hautes herbes au point que ne fussent plus visibles que ses longues oreilles. A la faveur de la lune, il l'observa déguerpir.

"Un lièvre...", soupira-t-il en récupérant son carreau planté dans l'écorce de l'arbre qui n'avait rien demandé. Il le rangea tout en balayant les alentours d'un regard inquiet, avant de reprendre son chemin. Il n'allait pourtant nulle part ; depuis deux heures déjà, il se contentait de tourner en rond dans les hauteurs surplombant Port-Salamandre. Ainsi, il restait éveillé et alerte. Surtout, cela lui permettait de se réchauffer un peu. La nuit était glaciale et il n'avait pas jugé bon d'emmener sa cape ce jour-là... A la place, de temps en temps, il soufflait dans ses mains pour essayer de les réchauffer, piétinait plus vivement sur le sol pour désengourdir ses orteils, frottait l'extérieur de ses bras de ses paumes pour se réconforter. "Aller Apollon, ce n'est rien de plus qu'une nuit d'hiver dehors... T'en as vu d'autres, hein ?" Ses lèvres tremblaient et, en parlant, s'échappaient d'elles de petites volutes de vapeur.

Les heures passèrent lentement, très lentement, tandis que la fatigue s'accumulait. Plusieurs fois il craint que Verticelli n'ait pas bien fait son travail et qu'un mort-vivant surgisse dans son dos quand il s'y attendrait le moins.
Pourtant, après toute cette attente, les premiers signes de vies gagnèrent les rues du port en même temps que naissait une lueur, bien loin à l'Est. Alors, enfin, Apollon regagna la civilisation et se mélangea à la foule. Peu à peu, alors que le Soleil s'élevait et commençait à baigner son visage d'une chaleur réconfortante, il regagna le fort de la Rétribution.

Arrivé sur place, il fit son rapport avant de regagner sa couche pour s'y écrouler. Enfin... C'est ce qu'il espérait du moins, avant qu'on ne lui apprenne ce qui était arrivé à sa femme. Alors, à la place, il passa une petite heure à la veiller pendant ce qu'il lui restait de sommeil. Et lorsqu'il fut temps pour les yeux de la prêtresse de s'ouvrir, ceux du rouquin étaient fermés. Profondément endormi à ses côtés, il resta au lit une grande partie de la matinée.

Citation :

Cela faisait un moment qu'aucune amélioration du fort n'avait été effectuée et c'est avec une certaine surprise - ou une indifférence totale - que les mercenaires auront assistés à la venue d'ouvriers chargés d'agrandir et d'améliorer l'écurie. De nouvelles montures ainsi que de petites cabanes pour le repos et les soins des animaux avaient été installées et l'enclos agrandit.

La dernière arrivée dans la compagnie avait pris en cette fin d’après-midi ses quartiers dans l’intendance après une rapide discussion avec la maîtresse des lieux. Rebecca n’était cela dit pas venue les mains vides : parchemins, fusains, ce qui ressemblait à un carnet de notes ainsi qu’un lourd tome avaient été ramenés par l’arcaniste. Cette dernière avait ensuite rapidement trouvé son chemin vers la section réservée aux artefacts et était allée s’installer à une table libre où s’étendait déjà son bazar, Révérence en mains.

Sans un mot et avec une concentration rare, l’enchanteresse s’était ensuite mise au travail. Sans démonter l’arme, Rebecca faisait de son mieux pour analyser son fonctionnement, déchiffrer l’enchantement en charge de la gestion de la surcharge de l’arme. La femme aux cheveux noir de jais s’arrêtait régulièrement dans son étude pour prendre diverses notes dans son carnet ou ouvrir le livre qui l’accompagnait en feuilletant les pages jaunies jusqu’à trouver l’objet des ses recherches. Ce petit manège dura au moins une paire d’heure sans que l’arcaniste ne relève le nez de sa tâche.

Une fois l’arme inspectée sous toutes ses coutures elle la délaissa au profit des munitions singulières allant de paire avec Révérence. C’est avec la même rigueur qu’elle analysa les cristaux faisant office de balles, notant leur calibre et tentant de mesurer leur puissance de feu basé sur ce qu’elle avait pu observer sur le terrain et au vue de ses précédentes conclusions sur le reste de l’arme.

Après plusieurs heures passées à l’intendance, Rebecca alla finalement remettre la carabine à sa place avant de repartir du côté de la salle commune pour poursuivre son travail en traçant cette fois divers schémas de coupe de l’arme mais aussi d’éléments inédits qui ne semblaient avoir rien en commun avec le reste. A cela s’ajoutèrent à mesure que la nuit se faisait plus pesante à l’extérieur divers traçages de runes n'ayant l'air que de complexes arabesques pour les non-initiés à l’enchantement.

Ce n’est qu’une fois les lunes bien hautes dans le ciel étoilé que l’enchanteresse retourna à sa couche avec sa foule de parchemins et de notes, l’air encore plus fatiguée qu’à l’accoutumée mais également ô combien satisfaite.

C'est en début de soirée que l'alteran avait filé, après avoir rapidement consigner une courte permission ayant pour motif un réapprovisionnement en composants.

Il n'aura pas redonné signe de vie jusqu'à l'heure du midi, revenant effectivement avec quelques bourses pleines de divers effets magiques dont il taira tant les origines que les propriétés, les dissimulant au fin fond de ses affaires pour dissuader les curieux.

Du reste, il semblera quelque peu éprouvé, le visage marqué par la fatigue, mal rasé, de toute évidence la nuit fût plus rude pour le sorcier.

L'agent 007 ne laissera derrière lui qu'un testament simple et concis, rédigé sur plusieurs petites pages d'un carnet qu'il laissait toujours sous son oreiller.

Citation :

A ma compatriote Mademoiselle Rica Explorivet, lieu de domicile fixe inconnu, je lègue mon Magnome 4x4GG et l'intégralité de mes boîtes de munitions en .44. Un tel bijou doit revenir à un membre de la Nation gnome, et vous en êtes un bijou également.

A mon collègue Monsieur Lucerius Baine, lieu de domicile fixe inconnu, je lègue l'intégralité de mes cinq (5) marques noires. Puissent-elles vous préparer à votre prochaine rencontre avec notre némésis d'un soir : ce terrible serpent de mer. Que les Ombres vous portent.

A la très douce Madame Colin d'Amara, lieu de domicile fixe inconnu, je lègue ma collection d'insectes, ma collection de boutons de manchettes, ma collection de cravates, ma collection de chaussettes et ma table à repasser portative. Ces artefacts inspirent une patience que vous incarnez. Vous me sauvâtes la vie plusieurs fois : pour cela, je vous remercie. Que la Lumière continue de vous guider comme elle le fait avec tant de force aujourd'hui.

A l'espiègle Mademoiselle Chani Lumeciel, lieu de domicile fixe inconnu, je lègue mon précieux appareil P.R.O.F.I.L Mod.II. J'y tenais comme à la prunelle de mes yeux, mais c'est une chose de voir le monde à travers les yeux d'un gnome, et c'en est une autre de le voir à travers ceux d'un gobelin. Et n'ayant pas de ces derniers à portée de main, vous êtes ce qui s'en rapproche le plus. Capturez les images, captez la réalité pour toujours et chérissez ces moments que vous tiendrez contre vous. Et surtout, faites réviser votre fusil par un professionnel agréé.

A mon ex-épouse Gillian Féplouf, 9 impasse des Orfèvre, Forgefer, je ne lègue aucune possession matérielle puisqu'elle m'a tant pris, mais je lui formule des excuses dues depuis des décennies et jamais prononcées. Gigi, pour tout, pardon.

A ma fille Miliann Zinzord, 9 impasse des Orfèvres, Forgefer, je lègue le fruit de la vente de toutes mes possessions qui ne sont pas susmentionnées ici et qui ne seront pas saisies sur décision de justice pour recouvrer mes créances auprès de la société VAP. Mimi ma petite larve de coléoptère, je t'aime plus que tout et pour toujours. Pardon ne pas avoir toujours été là.

Citation :

L'île avait vécue d'importants bouleversements ces derniers jours.  La bataille de la mine du Gué des glaces, bien que victorieuse, avait coûtée au Concile beaucoup d'hommes et privé l'organisation de son commandant en chef.
Les survivants, guidés par le capitaine Charbefer s'étaient établis à quelques kilomètres de la ville pour récupérer, dans l'attente des ordres du conseil.
Le goliath avait miraculeusement été sauvé par les ingénieurs du Forgeur de guerre qui étaient parvenus à l'extraire jusqu'à la position des troupes : interdisant de fait tout assaut de la par de la coalition rebelle.
A l'ouest, tout paraissait plus calme, mais on murmurait déjà que Faucon - l'ex-tourmenteur Carden - avait échappé à une tentative de capture des Fils du feu.
Le conseil tardait à agir et la tension montait d'un cran sur une île au bord de l'explosion.
Seul point positif, les attaques du Fléau semblaient pour l'heure avoir cessées depuis la défaite du Vizir des profondeurs et les partisans de Valtren se terraient profondément, en attendant leur heure.

Les oiseaux de nuit les plus tardifs auront eu le droit à un spectacle des plus saugrenu au cours de la nuit allant du 24 au 25.
En effet, un Syllar en dans la tenue la plus décontractée du monde sera venu réveiller un Camille Chat sans doute moins détendu en pleine nuit, aux alentours de quatre heures trente du matin. S'il n'était qu'en chemise et en pantalon, le sergent n'avait toutefois pas négligé d'emmener une pistole chargée aux négociation de : « Lève toi et va me faire dix tours de la cour intérieur puis trente pompes », conscient de l'humeur sans doute hasardeuse du Chat ainsi réveillé.
Il aura probablement cherché à se rhabiller pour se mettre au travail, le sergent lui aura gentiment indiqué qu'il « avait pas le temps pour ces conneries ». C'est donc dans son plus simple appareil que le mercenaire se sera fait extraire à son nid.
Une fois l'animal mis en mouvement, nu comme un ver, le demi-elfe se sera installé sur une chaise au milieu du cercle grossier décrit par sa victime improvisée. C'est une clope au bec et en admirant les étoiles de temps à autres qu'il aura supervisé la punition - sans doute arbitraire et non méritée - de Camille, du début à la fin, avant de le renvoyer dormir.
Il aura ensuite terminé de griller la cigarette à la belle étoile, visiblement très satisfait. Ce n'est qu'une dizaine de minutes par la suite qu'il aura été se recoucher à son tour, puisque manifestement il avait le temps pour certaines choses malgré tout. Il ne regagna le brise-voile qu'après être passé près de la cage au matou pour s'assurer d'entendre les ronflements indiquant qu'il dormait.

Aussi massif qu’il soit, il aurait pourtant été difficile d’affirmer que Dibbs prenait beaucoup de place au milieu des autres mercenaires menant leur petite vie à l’intérieur du Fort de Cendrebourg. Non pas que le guerrier vivait reclus ni ne participait à la vie commune de la compagnie, loin de là, c’était davantage une forme de pudeur pour lui que de ne pas trop faire déborder son quotidien sur celui de ses frères d’armes. Comme si, à son âge, reprendre ses marques, s’attacher à ses compagnons, et laisser une empreinte durable dans leur esprit, tout cela était plus laborieux ; et pour cause, tout cela avait une impression de déjà vu, chez lui. Il avait déjà vécu chacun de ces moments, par le passé. Peut-être la tâche lui paraissait-elle trop fastidieuse, surtout après avoir perdu Taleth, son camarade de route. Mais, petit à petit, ses racines commençaient à prendre pied ; à son rythme, il prenait la mesure de la place qui était la sienne au milieu de ces mercenaires.

Au milieu de sa petite routine bien huilée, l’on pouvait généralement le trouver installé sur un coin de table, étudiant des rouleaux de parchemins à l’allure exotique dont il compilait la traduction dans d’épais carnets, avec une minutie qui tranchait avec la rudesse dont il faisait preuve sur le terrain d’entraînement.  La rigueur militaire était quelque chose d’impossible à oublier dans la vie d’un homme, et Dibbs ne dérogeait pas à la règle : chaque après-midi, bien après les exercices du matin, il consacrait une heure ou deux à l’entraînement, rattrapant les quelques années de laisser-aller dans le domaine qui l’avaient laissé trop encrassé à son goût. Et chaque jour, après cet exercice physique des plus rigoureux, venait pour lui le moment d’inspecter son armure et d’entretenir cette dernière, pièces après pièces, dans un brouhaha de fracas métallique qu’il s’efforçait de rendre le moins pénible qui soit pour ses compagnons de chambrée.

Et la dernière pièce dont s’occupait le guerrier était à chaque fois son bouclier.

Et pendant plusieurs secondes, il contemplait ainsi la flamme écarlate dont était orné l’égide, les sourcils froncés, et l’air renfrogné. Un conflit insondable agitant son coeur et ses méninges, alors qu’il se tenait là, assis sur son lit, le bouclier entre ses mains, posé sur ses genoux. Il devait une fière chandelle à cet artefact, indubitablement, mais tout dans son aspect le rebutait, pour ainsi dire. Cette terrible flamme lui avait sauvé la mise plus d’une fois en venant balayer les adversaires qui lui faisaient face de quelques flammes divines dont il ne s’expliquait pas l’origine ; la Lumière elle-même était assurément de son côté lorsqu’il brandissait ce bouclier. Et pourtant, bien qu’il n’ait pas connu le pauvre Croisé qui était allé mourir sur le toit du monde avec la conviction en tête que la Lumière punirait ses ennemis ; bien qu’il n’ait lui-même jamais mis les pieds à Lordaeron ni été témoin des ravages du Fléau, pas plus que des crimes de la Croisade Écarlate, il n’avait aucun envie d’en porter l’emblème.

Un Croisé dans la jungle, menant ses zélotes sur un chemin sans retour, tracé dans le sang et les flammes.

Il avait déjà donné en la matière. Mené sa propre Croisade. Commis ses propres crimes. Contemplé cette lueur dans le regard d’hommes-bêtes à qui l’on livre les ordres les plus inhumains qui soient. Et il en était revenu, comme trop peu d’entre eux. Une poignée à peine. Un sociopathe au service de l’Alliance, qu’on lâche comme un chien fou sur les théâtres d’opération où plus aucun espoir n’est permis. Un dandy possédé par ses démons, fanatique à ses heures et marqué en sa chair par bien des horreurs. Et lui. Responsable et coupable d’un gâchis innommable.

Pour autant, le temps avait fait son office. Il n’avait pas besoin d’être rassuré sur l’homme qu’il était. Mais il n’avait pas non plus besoin d’ajouter plus de peine aux souvenirs qu’il traînait derrière lui. Cette flamme qu’il portait dans le dos attirait bien des regards dont il se serait passé, et d’autant plus encore sur cette île. Tout comme il rechignait à porter ce brassard qui faisait de lui un agent du Concile des Braises, il n’appréciait pas la façon dont était perçu ce funeste emblème. La crainte qu’il inspirait chez les habitants de l’Île de la Rennaissance, semblable à celle que les Fils du Feu distillaient comme un poison dans le coeur de ces pauvres gens.

«Même les soldats peuvent en avoir leur claque parfois. »

Et il avait fini par prendre sa décision, concernant ce bouclier. Le temps pour lui de réunir les outils nécessaires, il s’était finalement mis en tête d’effacer cette vilaine flamme. Si il n’avait rien d’un artisan, il n’était pas pour autant dénué d’imagination. Plusieurs jours durant, on aura pu apercevoir le guerrier penché sur son ouvrage dans un coin de la cour du Fort de Cendrebourg, repeignant soigneusement son bouclier en des tons plus chaleureux. Pinceau à la main, il appliquait la même minutie dans son gribouillage que dans l’étude de ses parchemins. Difficile de dire si le résultat aurait aussi fière allure que celui de l’artisan d’origine, toutefois, ça n’avait pas grande importance aux yeux de Dibbs : enfin, ce bouclier ne serait plus pour lui un mauvais souvenir à supporter.

DRUSS
"Gna gna gna, faut boucher les trous Druss, tu m'avais dit ça, gna gna gna." marmonne un Drusson, agacé, alors qu'il bouge les tonneaux et autres saloperies du chemin avec la bleuette et l'elfe au serpent, chassant quelques rats de plusieurs coups de pieds au derche, faisant fi de leurs couinements. Il avait déjà ramené, au préalable, de quoi boucher les trous : mortier, du chaux, de quoi nettoyer autour des trous, seaux d'eaux, éponges...tout le tralala.

"Et bhé, super." souffle le Drusson, agacé en voyant le gros trou creusé par les rats, se pinçant le nez face à l'odeur : surprise, ce n'est pas plusieurs trous dans les murs de la cave, mais un seul et unique gros trou, de la taille du bras d'Alieg - plus ou moins -, assez profond visiblement, laissant passer....de l'air ?

Enfin, quoi qu'il en soit, il se met à la tâche en dégageant le surplus de racine, grattant la terre avec couteau assez lisse et laissant la Chani déblayer tout ça avec une balayette, en bonne femme de ménage : déjà qu'il fait le plus gros du boulot, elle va pas râler à passer un peu un coup de balai, merde. Et Arelos ? D'après ce qu'il voit, il regarde son serpent qui chasse des rats. Boarf, pourquoi pas.

Sa tâche enfin terminée, il se met à faire un boooon gros seau, mélangeant de l'eau, mortier, chaux et tout le tralala, en une masse bien compacte et solide, se préparant à verser dans le trou...avant de se faire arrêter par une Chani. Les deux, sous les yeux probablement curieux et peut-être amusés d'un elfe, se chamailleront sur l'histoire du fameux trou avant qu'un Druss, blasé et agacé, remonte à l'extérieur, marmonnant des "M'emmerde avec ces rats l'aut' putain." se cassant sur les remparts pour souffler, après une matinée à déplacer la cave.

CHANI
Assignée au nettoyage à défaut de chasser les rats comme Alieg, Arelos et le vorace Ormiel, Chani donnait de grandes directives appuyée sur le manche d'un balai aux poils rongés. Une implication de bonne foi, faite de "tu ferais mieux de faire comme si ou comme ça" pour soutenir l'effort d'un Druss qui remuait les dalles et la terre comme un forcené en vue de dégager ce trou curieux. Penchée sur la cavité lorsque le guerrier s'affaira à préparer son torchis, elle l'arrêta sans sommation en le voyant revenir truelle en main. Pas question de mettre du mortier là-dedans ! Suivant un échange quelque peu houleux, tout ce petit monde remonta finalement à la surface..

ARELOS
« On m’a demandé de le prendre, alors je l’ai pris. »
   Arelos est descendu dans la cave, accompagné de son fameux crotale cornu, d’une belle taille et sûrement friand de rongeurs, quoiqu’il n’ait sans doute pas l’habitude de les traquer hors de son milieu naturel. A défaut de soutenir Druss dans sa tâche, le forestier s’efforce de traquer les rats en semant quelques fruits secs ou à coque pour les attirer. Armé de son sang-froid « presque » légendaire, il se jette chaque fois sur la bête, laissant son serpent vaquer à ses occupations, mordre et gober tout ce qui bouge, et lui offrant ses quelques prises en pâture ; toujours vivantes. A noter qu’une seule dose du venin d’Ormiel est assez puissante pour tuer sur le coup un millier de souris. Le calcul est assez rapide.

ALIEG
Alieg laisse errer le serpent... l'ordre des choses. Mais elle fera en sorte que les rats, s'ils sont trop nombreux, se barrent de la cave si besoin.

Je me réveillais peu avant les premières lueurs de l’aube, quittais le lit et chaussais mes bottes au bord ; l’humidité m’en trempait les pieds aussi assurément que l’aurait fait une averse. Mes mains, sans que je m’en rende compte, s’activèrent d’elles-mêmes sur les lacets de cuir que le noir incertain n’incommodait pas. Pas plus que mes yeux habitués à cette demi-obscurité. Je la traversais, étrangement à l’aise dans ces ombres n’en étant pas, et croisais d’autres insomniaques veillant là, à la lueur d’une bougie, sans que nous ayons à échanger une parole.  
Le silence, sa compagnie à lui seulement, me plaisait.

Alors, sans faire de bruit, je sortis dehors et inspirai une goulée d’air frais. Ma gorge et mes yeux me piquèrent. Je les fermis en même temps que je retins ce souffle dans mes poumons, attendant que la douleur s’en aille et soit substituée par une autre, dansant sous mes paupières sous la forme d’étoiles.
Ce n’est que lorsque mon corps n’en pu davantage que je consentis à vider ses poumons de l’air vicié, et que je repris une respiration normale. Je sentais ce cœur battre à tout rompre, charriant un sang oxygéné jusqu’à mes doigts bleuis par le froid. Par réflexe mes mains se frottèrent l’une contre l’autre et montèrent à mon visage, où et je soufflai mon haleine dessus comme une fumée dans l’air.

De légers flocons de neige voletaient dans le vent mugissant. L’immobilité, dans un tel environnement, condamnait à la mort. J’avais repris cette habitude de parcourir le fort de long et en large, d’en fouler les pierres usées et les planches grinçantes des heures durant. Ces balades – promenades ? – n’étaient interrompues que par les nécessités du corps et du lot mercenaire ; je participais aux entraînements, mangeais à la même table que ces mercenaires, entretenais mon fusil et, dès lors que je le pouvais, reprenais leurs chemins. J’en avais usé les semelles de mes bottes, et probablement perdu là-bas un fragment de moi-même. Était-ce pour cela que je refaisais sans cesse chemin-inverse ? Pour le retrouver ? C’était possible, et pourtant je savais ne pas atteindre ce « là-bas ». Pas tout de suite en tout cas. Et pas ainsi. Je le savais inaccessible pour l’heure. Mais ce n’était qu’une question de temps. Alors je tournais, tournais comme dans une cage en attendant mon heure, tournais comme le soleil autour d’Azeroth. Les journées défilaient, je le crois bien, sans que je m’en rapproche pour autant, et sans que mon état ne s’améliore.

En fin de soirée, alors qu’enfin moins de monde se pressait à l’intendance, Colin s’octroya du temps pour elle-même… tout du moins pour effectuer quelques recherches. Carte déroulée sur le bureau et rapport daté du mois dernier au côté, elle avait entouré le camp de chasse et Front-au-Vent à l’encre rouge, de sorte que ces lieux ressortaient tous les deux.

Et ensuite ? Elle s’était pris la tête entre les mains et avait soupiré. La piste, si elle était à peu près solide, concernait rien de moins qu’un port commercial dont la population devait s’élever à quoi… quatre cent ? six cent âmes ? En vérité la prêtresse n’en savait rien. Et elle ne savait pas non plus comment elle y ferait pour dénicher, parmi tout ce beau monde, le dénommé « Benjamin ».

C’eut été trop simple, sans doute, de placarder un avis de recherche sur toute l’île avec comme entrée : « Ton papa n’est pas revenu car il est mort, Benjy, alors viens chercher son dernier petit mot qui t’est tout adressé. ».  
Trop simple et par combien horrible. Elle s’en voulut d’avoir eu cette pensée et la chassa de son esprit en secouant la tête. Lumière que de sombres idées lui venaient parfois.
Non, définitivement, elle ne voyait pas comment procéder.
Se rendre au port et prier la Très Sainte de tomber sur cette famille ? Ils ne seraient pas les seuls à avoir perdu un proche ce jour-là et puis…
Etait-ce nécessairement au port que ce Benjamin résidait ? Le mot faisait cas d’une dispute survenue la veille, alors si ce n’était pas au port, au moins n’en était-ce pas trop éloigné.
Il fallait se renseigner, vérifier l’existence de villages aux abords du camp de chasse et de Front-au-Vent.

Mais cela attendrait le lendemain, car la nuit tombait et avec elle la fatigue.
Et puis… elle avait bien envie de passer quelque instant avec Willy le noir, et le voir se perfectionner à la maîtrise de son nouveau sabre.

Citation :

Au capitaine Aldwyn,

Je vous remets mes dernières volontés et espère que vous serez en mesure de les faire respecter.

Je vous remercie de m’avoir accueilli dans votre compagnie. Je n’avais pas beaucoup de respect pour le mercenariat. Je n’en ai toujours pas. Vous avez, par contre, le courage d’assumer des choix difficiles et je respecte cela.

A Anya Stroganov, fille de Darlya Hardow et Vladimir Stroganov, je légue l’ensemble de mon or gardé à la banque de Hurlevent.

A Logan Grant,

Je rends Paléos et je charge le capitaine de lui remettre le courrier ci-joint.

Au Lieutenant Trapp,

J’ai été fière de me tenir en première ligne à vos côtés. Merci de nous montrer l’exemple en ne reculant pas face au danger. Merci d’être là pour vos hommes.

Je vous légue ma machette du chasseur. Tapez fort Lieutenant.

A Debbie et Isaac,

Je suis heureuse que vous vous soyez trouvés et j’espere que vous continuerez à veiller longtemps l’un sur l’autre. Je regrette de ne pas avoir pu vous serrer dans mes bras une dernière fois mes amis mais peu importe où je me trouve maintenant, mon affection pour vous est intacte.

A Gatsi le magnifique,

Je suis désolée de t’abandonner Gatsi. Tu te souviens de la salle d’eau à Vaillance ? Merci de m’avoir appris à rire et de m’avoir encouragé à vivre et cela, peu importe, le temps que cela a duré.

Ce que tu m’as permis, autorise le toi.

A Alieg,

On ne se parlait pas beaucoup mais je crois qu’on s’estimait. Difficile de se découvrir quand on est volontiers solitaire. Tu veilles sur eux tous, toi la petite brindille qui est aussi solide que les arbres de la forêt de Féralas. Merci pour tout ce que tu as fait, pour moi, pour eux, pour Gatsi. Ils ont de la chance de t’avoir.

Je te laisse une potion de soin, un antidode, un colifichet de robustesse et un bracelet de régénération. Offre ces petits artefacts aux prochaines recrues qui feront preuve de bravoure.

A Salvador Borghese

On ne se connaît pas et pourtant on s’est tenu plusieurs fois l’un à coté de l’autre en première ligne. Je te laisse mon collier de rage, qu’il t’accompagne et qu’il te fasse frapper fort mais ne t’encombre pas de lui si tu n’assumes pas sa violence.

A Camille chat,

Je lègue dix-neuf marques noires.

Je n’aurai jamais cru à notre première rencontre que tu trouverais ta place dans ses lignes.

Au delà de la racaille, tu es devenu mon frère d’arme, celui qui ne recule pas, celui qui a vu l’horreur à mes côtés autant qu’il a provoqué le carnage. Je te juge pas Camille car je sais que, malgré ce qu’on veut faire croire, aucun de nous vaut beaucoup plus que toi.

J’espère que tu trouveras une place quelque part dans ce monde, à l’abri des batailles où tu pourras raccrocher tes armes et exprimer ce qui est beau en toi. Ne laisse pas la rage tout t’enlever.

A Edvard et Elimen,

J’aurai aimé vous revoir avant de faire mon dernier salut. Edvard, j’aurai aimé gagner juste une fois. J’en reviens pas de mourir en te laissant ce plaisir. Tu vas me manquer. 

Elimen, veille sur lui, malgré lui s’il le faut. Construisez vous votre avenir loin de tout ça.

A ma sœur, Darlya Stroganov,

Je laisse le soin au Capitaine de lui remettre le courrier que j’ai préparé pour elle.

A vous tous mercenaires,

Buvez un verre en mon nom et soyez braves.

Tanja Hardow

Citation :

Une nouvelle nuit froide s'achevait sur l'île de la Renaissance. Et quelle nuit. A couteaux tirés, les différentes factions de l'île lorgnaient les unes sur les autres, en chien de faïence.

A Port-Salamandre le capitaine Labranche attendait du haut de son fort et semblait pour l'heure totalement sourde aux sollicitations. La rébellion s'agitait dans la ville en attendant son heure, tandis que le tourmenteur Winchester récupérait de ses blessures.

Le manoir était muet. Nul ne savait à quelle guerre physique, ou non, se livraient les plus hauts responsables du Concile derrière ces hauts murs et les Fils du feu d'élite, à leur poste, ne laissaient filtrer aucune information.

Cendrebourg était au bord de l'implosion. Les soldats du rempart envoyés par l'Ouest tâchaient de maintenir un semblant d'ordre mais les Fils du feu se divisaient malgré les efforts de l'interrogatrice débordée. L'absence inquiétante de l'inquisitrice ne faisant que renforcer les doutes.

La compagnie avait doublé la garde et se tenait prête à agir - ou à se défendre contre les agressions. Le retour matinal de la troupe de l'aspirant d'Amara avait été accueilli par des sentinelles sur le qui-vive. Des réfections du terrain d'entraînement avaient été effectuées à la hâte et un laboratoire d'alchimie improvisé pour renforcer l'efficacité des potions.

L'Est était une frontière où les troupes du Concile et les rebelles se tenaient à l'œil, conscients qu'il suffirait d'une étincelle pour mettre le feu aux poudres et embraser l'île toute entière.

Quatre jours que j'ai été déployée dans cette région que je ne connais pas, avec ces gens que je ne connais pas.

Je ronge mon frein, je tourne en rond, j'observe, j'écoute et je m'adapte a cette nouvelle routine qu'est la mienne. Je m’entraîne en attendant que ça arrive et bordel ça arrive enfin !

Premier déploiement, j'avance dans une ligne composée de visage que je ne mémorise pas encore, quelques noms fusent ci et là dans ma tête, je tâche de les retenir au mieux.
J'identifie le principal, tabard différent, monture et moustache grise, ça doit être le Lieutenant alors j'écoute, j'avance et je la ferme. Je connais la routine, je l'ai vécu longtemps, on discute pas, on réfléchit pas vraiment non plus, on hoche et on avance. On se concentre, on réagit.

Et quand ils arrivent, je suis prête. Du bois et des os ? Un détail, je me protège, je protège les autres, les réflexes reviennent vite, je sens l'adrénaline qui monte en moi. Une grenade explose a mes pieds, le bois, les os et la terre volent de partout et souillent mon écu, mais je tiens, putain ouais je tiens parce que j'ai toujours tenu et que j'aime ça tenir. Alors je tiens.

D'un bref coup d'œil, je vois cette femme à ma gauche, elle aussi elle tient, elle tranche dans le tas et découpe le bois comme du beurre, elle beugle quelques ordres alors j'écoute, j'obéis, je m'adapte.

De longues secondes passent, des minutes, des heures ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Les explosions, la magie, le choc de l’acier, tout ça s’emboîte comme une douce mélodie familière a mes oreilles et je tiens.
Ils tombent, on en voit le bout mais alors vient le feu, les cris et la colère. J'ai chaud, j’étouffe, j'ai du mal a voir alors que s'élève le feu face à moi. Mon cœur s'emballe, mes mains tremblent mais mes jambes, elle, continue d'avancer alors je lutte, je tiens.

Ma tête bourdonne, ça siffle, ça tourne, j’entends des choses et surtout j’en vois ! Je vois Chicot ramper dans une flaque de boue et de sang, il se traîne lui et ses tripes sur le sol vert de la jungle et hurle comme un porc lorsqu'un troll vient lui ouvrir la gorge par derrière…
"Putain non, Reprends-toi !" Je m'ébroue comme une bête et cligne des yeux, la réalité reprend le dessus sur le songe, a peine ai-je le temps de réaliser que mon esprit se joue de moi que cette crevure naine s'embrase comme une torche et m'emporte moi et la guerrière dans un torrent de feu.

Merde... L'odeur âcre du cuir brûlé m'envahit la gorge, mon corps refuse de réagir, il refuse de respirer alors je me tortille au sol comme un misérable ver, je geins, je pleure
Je dois tenir, je dois me relever mais je n'y arrive pas.


Je tourne la tête à ma droite, elle est là, elle me fixe, les yeux vide et vague. La guerrière ne beugle plus elle n'agite plus son épée. Elle me fixe de ce regard que j'ai déjà trop vu alors j'essaye de m'en éloigner, je rampe dans cette boue rougeâtre, je fuis, mue par une terrible envie de vivre et la peur de ce regard terne posé sur moi.


Ces mots résonnent dans ma tête. "Je dois vivre. Qu'est-ce que je fou ici putain ? Pourquoi j'ai replongé là-dedans ? Pourquoi j'ai été aussi idiote !?" Les questions fusent dans ma tête, bien vite dissipées par la sensation du cuir qui fond sur ma peau. Puis viendra l’obscurité, illuminée par la brève présence d’une brindille a peine solide, une jeune pousse trop fragile pour cet endroit, mais suffisamment courageuse pour m’empêcher de crever comme une chienne dans la boue.


Quatre jours et je me retrouve allongée dans un lit d'infirmerie, le corps ficelé de bandages et d’onguents sentant la merde de fée, j'ai mal, je souffre. Alors je reste là, a fixer inlassablement ces gouttes qui s'échappent du plafond et tombe au sol dans un rythme régulier.


Je repense à tout ça, je repense a Hurlevent, a ses rues bondées et ses citoyens par millier, le bourdonnement de leurs discussions stériles et bourrées d’insouciance, leurs tronches d’empaffés trop gâtés et surtout je repense à ces abrutis au tabard bleu et or bien propre puis je regarde mes bras, mes bandages et je me prend a sourire comme la dernière des connes. Je me sens vivante.